L’absolue perfection de ses paysages et la convivialité de son accueil font de cet atoll une destination exceptionnelle. Là, au cœur de l’archipel des Tuamotu et de ses singulières îles coralliennes, un nouveau monde est à découvrir.
Au début, à perte de vue, le bleu profond de l’Océan Pacifique. Puis, sous les ailes de l’avion apparaît une succession de couronnes comme posées sur la mer, vision marquante, si propre à l’archipel des Tuamotu. Rapidement se détache de ce panorama la plus grande d’entre elles, large forme allongée où brillent des bleus incomparables. Bienvenue à Makemo ! Cet atoll est situé au centre du vaste archipel des Tuamotu qui s’étend sur plus de 1 300 km d’Est en Ouest et rassemble 78 îles. Cet espace constitue un patrimoine environnemental et humain exceptionnel. L’archipel compte une île haute, Makatea, et 77 atolls sur les 425 recensés à la surface de la planète. Il est donc un des plus vastes ensembles de ce type au monde. Ces îles, dont Makemo fait partie, sont les vestiges d’une immense chaîne montagneuse d’origine volcanique qui barrait autrefois les eaux du Pacifique. Des sommets et des hauteurs de ce gigantesque édifice dont la formation remonte à des millions d’années ne demeurent, aujourd’hui, en surface, plus rien, si ce n’est les formations de coraux qui, jadis, bordaient les rivages de ces îles. De vivantes constructions qui constituent ces gracieuses formes sur l’océan. Située à 500 km au nord est de l’île de Tahiti et s’étirant sur plus de 70 km de long pour une largeur allant de quelques kilomètres à une quinzaine, Makemo est le troisième plus vaste atoll de l’archipel. La superficie de son lagon dépasse les 800 km2. En comparaison, cela représente presque deux fois la superficie du Lac Léman en Suisse…
Deux passes font communiquer cette mer intérieure avec l’Océan : Arikitamiro au nord-est et Tikaraga à l’Ouest. Ces voies de circulation permettent à des navires à fort tonnage de circuler dans l’atoll pour le ravitaillement, notamment, mais aussi des bateaux de croisière. Dès la fin du premier millénaire, Makemo, comme l’ensemble de l’archipel, a été probablement peuplé par les Polynésiens lors de leur grand mouvement de colonisation des îles formant l’actuelle Polynésie française. Dans l’archipel, ces derniers développèrent une civilisation bien adaptée à cet environnement si particulier. Navigateurs hors pair, ces premiers habitants parvenaient à entretenir des échanges au sein des Tuamotu, mais également avec les autres archipels de Polynésie. En 1802, les rivages de Makemo sont aperçus pour la première fois par un Européen. En 1853, l’archipel et Makemo passent sous la domination coloniale française. En parallèle, les missionnaires sillonnent ces îles pour convertir les populations au christianisme.
De cette présence religieuse du XIXe siècle demeurent aujourd’hui des constructions aux architectures bien spécifiques en corail et en chaux. Le visiteur pourra d’ailleurs découvrir à Makemo de beaux exemples de ce patrimoine telle l’église Saint-Joseph bâtie à la fin du XIXe siècle, une des plus anciennes de l’archipel. Mais surtout, les religieux et l’administration coloniale encouragèrent fortement le développement de la coprahculture, modifiant ainsi durablement les paysages de l’atoll et faisant du cocotier l’arbre roi de ses paysages ! Aujourd’hui, Makemo accueille environ 800 habitants installés principalement au village de Pouheva en bordure de la passe Arikitamiro. Au cours des années 1990 et 2000, l’atoll a profité du développement de la perliculture, mais cette activité est entrée dans une phase difficile. Du coup, pêche et coprahculture ont repris une place importante dans l’économie de l’île. Le tourisme se développe également car l’atoll propose un environnement d’une beauté exceptionnelle. L’île possède même un club de plongée permettant ainsi de découvrir la faune et la flore sous-marines. Un peu à l’écart des grands circuits touristiques, Makemo est un joyau méconnu qui veut maintenant briller aux yeux du monde !
À la poursuite de la perfection…
En 1926, après une longue odyssée qui l’a conduit de l’Atlantique Nord aux îles de Polynésie, le navigateur français Alain Gerbault aborde les rivages de l’atoll de Makemo. Il est “À la poursuite du soleil”, finalité poétique et maritime de son périple et titre du livre à succès que lui inspirera cette aventure solitaire à bord de son petit voilier le Firecrest. L’aventurier tombe sous le charme de Makemo qui est pour lui “l’atoll de la Perfection”. Sentiment que tout visiteur partagera tant il est justifié. Et tel Alain Gerbault, il faut partir à la poursuite du soleil pour découvrir cette perfection.
Symphonie de couleurs
Cap en premier lieu sur la pointe est de l’île, à Tepohue, pour une rencontre avec un lieu à la beauté presque surnaturelle où mer, terre et ciel se mêlent dans une étourdissante symphonie de couleurs et de lumières ! Abandonnant progressivement son bleu profond, le lagon laisse apparaître une palette de bleus et de turquoises incomparables. Complétant le spectacle, apparaissent, en toile de fond, les motu et leurs rangées de cocotiers dont le vert se démarque parfaitement du ciel bleu. Le sable se pare de dégradés de rose et de rouge, des teintes uniques dues à des micro-organismes qui se développent dans ces eaux particulièrement chaudes et peu profondes, les foraminifères. Une création merveilleuse façonnée au fil du temps par l’accumulation dans cette extrémité de l’atoll des sables et sédiments coralliens transportés inlassablement par les houles dominantes. Un paysage particulier aux Tuamotu. Une telle magie se retrouve aussi dans d’autres atolls de l’archipel, toujours aux pointes sud et est, mais, à Makemo, l’œuvre façonnée par la nature tout au long de millions d’années d’érosion atteint ici la perfection.
À quelques pas du rivage, s’est formée une magnifique “piscine” naturelle aux eaux délicieusement turquoises. Un chenal semble la relier aux zones plus profondes du lagon. Un lieu merveilleux ou rêves et légendes se rencontrent, transmis par les gardiens de l’histoire de l’île. Dans les temps anciens, un “sorcier” de Makemo aurait été dépositaire du pouvoir d’attirer dans cette grande vasque les baleines, malheureusement pour leur faire connaître un funeste destin… Néanmoins, ce sacrifice était fort utile car la graisse et la chair des animaux représentaient une ressource non négligeable pour nourrir la communauté. Aujourd’hui, on ne tue plus les baleines à Makemo – naturellement – mais on les observe car ces majestueux mammifères marins se rencontrent fréquemment dans les eaux du lagon. Lors de “l’hiver austral”, elles viennent y trouver calme et repos.
Forces de la nature
Laissant ces lieux, on poursuit son chemin, cap plein Est en empruntant une magnifique voie maritime longeant le récif. Ici, plus de motu, seulement la barrière de corail où viennent déferler les grandes houles du large. Les jeux de l’eau, de la lumière des roches aux couleurs étonnantes façonnent cette large bande de couleur. Ce paysage impressionnant se déroule sur plus d’une soixantaine de km, en fait sur toute la longueur de la côte sud de l’atoll. Là encore, ces lieux racontent les forces dominantes de la nature car cette partie du littoral est la plus exposée aux houles dominantes. Leur puissance ne permet pas l’accumulation du sable et des débris coralliens qui forment les motu. Ces derniers ont trouvé refuge à l’exact opposé, sur la côte nord-est où ils forment une longue bande de terre d’une soixantaine de kilomètres. C’est là que vivent les habitants de l’atoll. Mais comme toute règle à son exception, apparaissent à mi chemin, deux petits motu. Entourés d’eau turquoise et couverts de cocotiers poussant sur un sable d’un blanc éclatant, ils sont une représentation parfaite de ce qu’est un coin de paradis tropical dans l’imaginaire collectif ! Un paradis que fréquentent beaucoup les habitants de Makemo le week-end ou pendant les vacances. Ils sont nombreux à embarquer pour venir y faire des pique-niques et apprécier toute la beauté du lieu. Le village de Pouheva est situé à l’autre bout du lagon, en face, à quelques minutes de bateau seulement.
En plongée…
Et justement, il est temps de traverser le lagon en mettant le cap sur le tranquille village. Le clocher de l’église constitue un repère des plus commodes pour la navigation. Se dessine aussi une large trouée dans cet horizon, la passe Arikitamiro. Elle est l’un des deux poumons de l’atoll car faisant communiquer les eaux du large à celles du lagon. Les navigateurs redoutent les courants qui s’y créent et le phénomène du mascaret, des vagues créées par le déplacement des énormes masses d’eau entrant ou sortant de l’atoll en fonction de la marée. Ce spectaculaire phénomène donne aux eaux toutes les apparences d’un puissant fleuve. Les pêcheurs viennent y naviguer pour pêcher à la traîne à la tombée de la nuit. Ils se faufilent avec maîtrise entre vagues et courant alors que le soleil déclinant à l’horizon fait baigner les paysages environnants dans une chaude lumière orangée. Mais le spectacle est ici sous l’eau car la passe est le lieu où les marées apportent tantôt les eaux claires et renouvelées du large, tantôt celles plus riches en micro-organismes marins du lagon. Un mouvement perpétuel bénéfique pour toutes les espèces sous-marines qui s’y retrouvent, de la plus grande à la plus petite. Dans ce lieu de rassemblement se croisent et se côtoient bancs de carangues, rougets et kopa, et même des raies manta. Un monde sous-marin plein de vie où l’homme se rend respectueusement lors de plongées. Elles sont parmi les plus réputées de tout l’archipel en raison de l’abondance de la faune sous-marine.
Plus à l’Ouest encore
Laissons ce monde sous-marin, pour poursuivre la route toujours à l’Ouest. Après avoir dépassé les rivages du village et son quai, on longe une série de motu. Sur plus d’une cinquantaine de kilomètres c’est une donc succession de paysages idylliques alternant motu et hoa, ces passages peu profonds faisant communiquer le lagon et l’océan. Makemo peut s’enorgueillir de posséder parmi les plus beaux motu de l’archipel avec de vastes plages de sable blanc ombragées de cocotiers, une fois de plus la parfaite représentation du paradis tropical. Alors que l’embarcation file sur les eaux du lagon, le paysage défile sans que le spectateur ne se lasse des jeux de lumière et des nuances de couleur des panoramas. Une halte s’impose cependant sur l’un des plus beaux, le motu Punaruku. À la beauté du lieu s’ajoute une certaine solennité car ce site est le lieu d’implantation de l’ancien village. À la fin du XIXe siècle, il a été abandonné au profit de Pouheva. De cette ancienne présence humaine ne demeurent que les vestiges en corail et en chaux de l’ancienne chapelle et de ce qui fut une prison. Plus loin, une tombe, elle est datée de 1927… Le lieu est enchanteur, alors pourquoi a-t-il été déserté ? Dans les récits des Anciens, il est évoqué la lèpre qui aurait frappé ce lieu à la fin du XIXe siècle. Marqué du sceau terrible de la maladie, il aurait donc été définitivement délaissé par les habitants de l’atoll. Une histoire bien triste que l’on peine à imaginer aujourd’hui. Quant à la lèpre, dans nos contrées, elle est enfermée dans les livres d’Histoire…
Légendes et sirènes
Plus à l’Ouest encore, le paysage prend une nouvelle dimension, plus sauvage encore. Nous sommes arrivés à l’extrémité de l’atoll, à la passe Tikaraga. Au sud de cette passe, après une série de motu, apparaît le motu Vaigatika, un des plus grands et des plus beaux de l’île. À son abord, d’impressionnants coraux émergent de l’eau car la marée est basse. Ils parsèment la petite baie, ponctuant de leurs couleurs vives le turquoise du lagon. Une longue langue de sable ajoute un trait de lumière presque aveuglant à ce panorama. Mais le motu Vaigatika accueille aussi l’un des sites les plus singuliers de l’atoll, le komo Mokorea, le “trou aux sirènes”. Une petite étendue d’eau saumâtre, perdue au milieu de la cocoteraie. Une mare dont la présence est plutôt incongrue dans cet univers de corail et d’océan. Une curiosité géologique, assurément, dont on peine à percer le secret, mais aussi un lieu de légende. Ne dit-on pas que ce lieu était fréquenté par les sirènes dans les temps anciens ? La légende est belle, complétant idéalement les agréables visions de Makemo, cette terre de bien-être et de perfection, ces buts poursuivis par tous et, ici, accessibles à chacun.